jaiplusdesouvenirs

01 avril 2007

 

HEAT a revoir


AU DEBUT


c'est en définitive cocasse.



Elles sont penchées au dessus de lui et le regardent en riant, une forte lumière complice filtre à travers leurs fins cheveux blonds, scintillant comme seules scintillent les choses sous l'effet de la reverbération de la neige, et qui pendent vers lui. Leurs doux sourires innocents sont ceux des familles heureuses, en vacances, partageant des moments privilégiés.

Il ne fait pas vraiment froid. Malheureusement.

Lui aussi il rit de se voir ainsi immobilisé, en dessous d'elles toutes, qu'il aime tant : sa femme ses deux filles. Il ne voit que leurs silouhettes en contre jour, qui se découpent sur le ciel pur, bleu, implacable. Il a du mal à lever la tête tant le soleil est aveuglant, puissant. Malheureusement.
Elles lui parlent et lui lancent des boules de neige, se moquent hahaha papa est tombéheu, papa i peut pu bougerheu.

Seul le guide semble inquiet bien qu'encore confiant je vous avais demandé de ne pas quitter le groupe et de rester derrière moi, allez on va vous sortir de là.

Il s'agenouille et tend la main vers papa, qui est juste à un mètre en dessous de lui. Papa tend le bras vers le guide de montagne qui bande son bras vers papa, en vain. Le guide demande à un autre touriste de le tenir par la taille pendant qu'il essaie de gagner quelques centimètres, en vain. Leurs mains ne se joignent pas. Et si papa tend trop son bras, il adopte une position qui le vrille et le fait glisser sur la paroi.


Le guide lui demande donc de ne plus bouger. Ne bougez absolument plus, lui dit-il, je reviens.

La mère devient grave, elle a compris au visage du guide qui s'éloigne que quelque chose lui échappe. Elle regarde son mari un mètre au dessous d'elle, et lui sourit, l'air faussement confiant, il devine les traits de son visage, les croit rassurants.

Il reste souriant, il est si près d'elle, il pourrait presque la toucher. Il tend la main. Elle tend la main. Non il est trop loin.
Pendant qu'il cherche à l'apaiser, tout va bien ma chérie, le guide va revenir avec une corde, ils rient, elle se calme. Il entend la neige crisser doucement derrière son dos et se sent glisser de quelques centimètres à peine. Pas de quoi s'inquiéter.

Le guide revient sans corde, mais il a appelé les secours qui ne vont pas tarder à arriver dit-il, c'est une question de minutes. Il demande aux touristes de s'écarter et que seule la femme reste avec son mari. Les filles insistent pour rester. Il acquièse. Et puis il ne peut pas les laisser à l'écart seules, c'est trop dangereux.

Le temps passe, une demi heure, l'homme a froid, vraiment froid, il grelotte, il n'ose pas regarder au dessous de lui, le vide. Sa femme décide qu'ils vont chanter une chanson allez les filles et ils entament Ringa la panthère qu'ils chantaient souvent quand les filles étaient bébé tu te souviens chéri ? Ringa la panthère, va à la rivière, sur le dos de Fanfaron, l'hippopotame au dos rond, quand soudain papa s'enfonce brutalement de plusieurs centimètres, ayant fait fondre une aspérité sur laquelle il reposait jusque là. Sa femme crie, il crie, ses filles ne savent si elles doivent rire ou pleurer. Le guide est de plus en plus inquiét, ils vont arriver dit-il malgré tout, ne vous inquiétez pas, ils ne vont plus tarder.

Mais papa est maintenant à quelques deux mètres de profondeur, il ne voit plus le soleil que par une petite ouverture, au dessus de lui, Candy, Barbie et Blanche Neige, les yeux mouillés de larmes face à la souffrance de leur père ou mari.

Lui le visage bleu, les lèvres violettes, tremblant, immobile, mes chéries ils vont arriver ils vont arriver répète-t-il, Mais qu'est ce qu'ils font crie la mère, hein ? qu'est ce qu'ils font ? pourquoi ne sont-ils pas là ? maman, qu'est ce qu'il se passe ?

Mais lentement, sa chaleur de père creuse sa tombe et la neige fond inévitablement, il s'enfonce et bientôt il est loin, le mari aux bras si puissants dont elle se remémore la chaleur des étreintes si douces et du bleu glacial de la crevasse qui l'avale, le dévore, doucement l'ingurdite, il leur parle encore par monosyllabes, il entend leurs voix, Barbie, Candy et Blanche Neige aux rires cristallins qui se brouillent dans son souvenir.



Il glisse, sa femme pleure, elle l'appelle, il ne répond plus, le froid a raison de lui, elle ne voit plus que ses pieds.

A LA FIN
c'est bien évidemment tragique.

Quand les secours arrivent, il est bien évidemment trop tard.



Une chanson douce, que me chantait ma maman, me chantait mon père quand j'étais enfant, en suçant mon pouce j'écoutais en m'endormant. Cette chanson douce, je veux la chanter pour toi, pour toi O ma douce...



A nos pères, dont nous sommes les crevasses.



Comments:
A toi Lunar, rudement contente de ton retour, et toutes ces notes en crevasses, crevures, cul par dessus-tête, tranches de crève-coeur et foie de morue bien chaloupée, ma foi, je m'en délecte de haut en bas avant de me casser quelques jours. Des bises entre les oeufs de Pâques.
 
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