jaiplusdesouvenirs

15 octobre 2006

 

Flores


Je pue, je me sens sale, c'est la seule impression bien nette de moi-même que j'ai à ce moment là, je me sens dégueulasse et pourtant ma sueur est celle de l'effort accompli, du corps qui a travaillé et mérite repos, elle est celle dont on prendra plaisir à se débarrasser bientot mais qui jusqu'à cette échéance nous accompagnera comme l'effluve de l'autosatisfaction. Une sueur camarade en somme, si je puis me permettre...
Mes cheveux sont tressés sur mon crâne, une jolie cascade de tresses figées que l'ont m'a faites quelques jours auparavant dans une ville éloignée, dans les Caraïbes...
Je respire enfin, je me libère d'un poids qui pèse depuis le matin 6h, les magazins viennent de fermer à Flores, reculer mon billet d'avion ne dépend plus de ma volonté. Je n'ai à présent plus qu'un seul objectif, me replonger dans les photos de Tikal, en mangeant ce cordon bleu maison que j'ai aperçu sur un menu, respirer seule face au soleil couchant sur le lac de Flores, écouter les bruits de la jungle qui doucement vont s'imposer, souffler, boire une bière... avant d'aller me laver pour dormir enfin.
Et avant tout, une cigarette épiphanique.
Pas de feu.
Je cherche, je regarde autour de moi "tiene fuego por fa ?" non, ils ne fument pas beaucoup par ici et dans ce magazin, je vois un foyer de cigarette allumée... j'entre "Hi do you have light ?" dis-je à un visage caché sous une casquette rouge. "Sure" Il lève les yeux, nos regards se croisent, oh ! je cache mon trouble face à sa beauté et, je sors.

Je me reconcentre sur mon restau, clope au bec, toujours crade à souhait et j'entends "excuse me, are you travelling by yourself ?" Il m'a couru derrière, j'ai du mal à y croire, et ne serait-ce mon état de fatigue et de saleté qui anéantit en moi tout espoir de séduction, j'aurais eu le coeur battant à tout rompre.
Je lui explique que je vais manger et lui dis de se joindre à moi, il me répond qu'il a déja mangé "Entonces vas a beber" lui dis je. Il me suit.
On va s'assoir en terrasse du lac, de l'autre côté la jungle... le soleil se couche, le paysage est sauvage, le ciel s'embrase de ces mille couleurs extraordinaires qui confèrent à chaque instant la force de l'éternité (je sais on dirait du J. Dassin).


Le temps ne passe alors plus. Alors je le regarde, je le regarde et je sens toute la tendresse en lui d'un enfant qui essaie d'être un homme et que la solitude effraie. Il m'a couru après comme il aurait couru vers sa mère dans la rue, il se déçoit car il n'arrive pas à s'ouvrir au voyage, quelqu'un lui manque, il s'en veut. Je lui dis d'écrire, il ne sait pas, je lui explique comment faire et plus je le regarde et plus je me sens proche de lui mais nous ne pensons pas à nous séduire tant le temps est suspendu. J'ai devant moi des heures pour penser à ça.
Et je ne le désire pas, mon désir serait inadéquat, incongru en cet instant de palabres. La nuit tombe, le ciel est encore fushia de part en part, l'eau lisse est clairsemée des petites lueurs des bateaux de pêcheurs.
Un autre homme m'attend ailleurs, je ne veux pas tout mélanger. Je veux juste profiter de la douceur fragile de cet homme enfant dont les sourires m'enchantent.
Souvent, entre deux cigarettes, ou deux vodkas, on s'arrête, on regarde autour de nous pour s'imprégner du pays, de ses bruits, du vent chaud, de cette ambiance de bout du monde. Et puis on repart à batons rompus, vodka et cigarettes. Le serveur vient s'assoir avec nous, il est ivre et pénible, mais grace à lui notre désir d'intimité se fait plus net. Nos regards complices en disent longs sur notre envie d'être seuls.

Et les 12 coups de minuit retentissent.

Alors le bar se transforme en bouge fermé, et les rues sont moins sûres et on n'est ensemble que depuis seulement 4h a boire et parler et je ne veux pas le laisser partir et en même temps je me sens si sale et si repue de celui avec qui j'ai passé les dernières nuits que je manque de faire ce geste, de dire ce mot... il me raccompagne alors à mon hotel
- Viens lui dis je, sur laterrasse on parlera dans les hamacs, et on regardera la nuit noircir
Il me suit. Le garde se réveille, me regarde, le regarde, "no no" dit il, "demasiado tarde"
Alors je ne sais plus quoi dire, bêtement je me retourne vers lui et lui dis "bon adieu alors, on se revoit dans 3 jours à Antigua" Il me prend dans ses bras, embrasse le coin de mes lèvres, part.

Je monte dans ma chambre. Je ressors, je claque la porte, je descends, je réveille le garde à nouveau, je mens, je sors je cours je le cherche, je retourne au bord du lac, je fais une rue, deux rues, je demande aux passants qui assis sur les pavés discutent "Donde donde ? mi amigo !" ils ne savent pas.
Je l'ai perdu.
Je rentre par le lac, je ne devrais pas. C'est dangereux, pollué de moustiques. Je cherche son souvenir, je revis ces quelques heures étranges où pour la première fois je crois, je ne voulais pas plaire, je voulais juste être en vie, avec lui, là, hors temps, hors lieu, si loin "lontano non ?" "ma, si, ma mi piacce stare cui contigo lontano da Roma".
C'est trop tard.
Rome Rome, après New York...

Quelques jours plus tard je reçois un mail. On ne se croisera plus.

Je l'attends, il m'attend. Il est à Rome, il doit venir. Je dois y aller.

C'est absolument étrange ce que l'on peut aimer un inconnu avec toute la force de ce que l'idéal construit comme illusion, ce que je peux souhaiter le revoir, ce que mon coeur s'emballe à chaque fois que je l'imagine près de moi. C'est absolument puéril, délicieusement débile, dangereusement excitant, follement absurde.


J'attends.


Comments:
La narration.... moi je trouve que tu n'as rien perdu. L'écriture est à la fois tenue et libre....
Et puis c'est un souvenir qui semble avoir de l'avenir...C'est bien quand les temps se mêlangent...
 
Là, par rapport à la note précédente, c’est :

BG complètement et simplement (non ! pas que simplement...

mais en tout cas sans BN :

Car c’est BG en valse hésitation, en suspens, que le rêve -ou le fantasme- demeure de BN, sans se confronter à l’épreuve du réel qui pourrait le révéler BM ou BR...

“Un autre homme m'attend ailleurs, je ne veux pas tout mélanger” :

mauvais choix sur le moment peut-être...

Les souvenirs les plus persistants ne sont pas les actes effectués, mais ceux désirés inaccomplis, car le désir ne s’est pas épuisé et donc demeure, et permet sans limite le renouvelé jeu des (re)constructions imaginaires !
 
ah mais lui il n est pas incarné, il n a donc pas de sexe... il est pur en moi, idéel
 
non franck, c est plus ca, tu le sais bien, mais ca va revenir, supprimer les comm ça fait du bien a l authentique..
 
"Je pue, je me sens sale, c'est la seule impression bien nette de moi-même que j'ai à ce moment là, je me sens dégueulasse et pourtant ma sueur est celle de l'effort accompli, du corps qui a travaillé"

Donc, Lunar, n'angoisse pas, et va de l'avant, tu es belle malgré tout, non ?
 
"Je pue, je me sens sale" ...!!!!!!

Déconne pas petite soeur,
tu as l'odeur de la vie, et si cela débecqte des cons, tu les envois chier,
et te trouves des normaux si possible qui accepteront d'en prendre plein les narines et ailleurs...

Les phéronomes, cela existe, non ?
 
mmm qd meme, la pour seduire un prince charmant, Loreal fait des trucs un peu mieux que Cro magnon...
 
oui je suis belle comment le sais tu ? :p
 
Nous avons vu ta photo...

De dos, certes, mais bon !

Et un mamelon aussi, et dans les vagues de la mer...

Cela permet d'avoir une idée déjà, et de toute façon, faisons confiance à leur goût, tes élèves ont l'air de bien te bicher, non ?...
 
vagues... suppositions !
 
Ou suppositoires ?

Tu dors ?

Reprends,toujours et encore, ton bel envol, petite soeur...
 
lunar a dit…
vagues... !
_________

"Vagues".....

Oui, toujours en va et vient sur la plage des désirs s'offrant à l'assaut !

Plutôt que de "suppositions", il est alors question de "superpositions"...

Petit coup de bec sympa, Lunar !
 
mon ordi est encore out of service !! c'est penible... je reviendrai encore plus fort, tres vite...
t inquiete je bouillonne
 
Ordi de merde...

Oh merde !

Pas grave... et fais comme tu peux, et bouilonne, ou zébulonne toujours !

C'est ça qui est important...

Au plaisir, quand ce sera mieux, ou régulé, de te lire !
 
Tu sens bon...
 
"Follement absurde"....
 
Ah ben dis donc doudou Lunar...

C'est morne plaine !

Toi a pa ni plus souvenir ni nouveauté ?

Ordi out ?

Eh ben merde !
 
salut anonymous et toi qu est ce tu racontes ?
j ai pas d ordo je consulte chez les uns et les autres, et puis je n ai plus envie d ecrire, les gens qui me lisent ne m incitent pas a la confession, a l aveu, a plus grand chose en fait, je me demande si l aventure va continuer longtemps... "ailleurs, jamais peut etre"
 
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